Tribune
Face à la concurrence des cabinets de conseil, des Gafam ou des start-up, les agences doivent jouer la carte de la transparence et revenir à leurs territoires de compétences. Il en va de leur survie.

Nous sommes entrés dans un nouvel âge de la communication et il n’est pas certain que nos agences survivent encore bien longtemps. Celles-ci sont maintenant directement concurrencées, menacées, bousculées - quand elles ne sont pas dépouillées de leurs talents - par des concurrents auto-proclamés « experts en communication » : cabinets de conseil dont le premier métier est l’audit financier, « fermes à contenus », dont le primat de la quantité sur la qualité devrait faire fuir les annonceurs, groupes de presse (qui hier encore méprisaient souverainement les communicants), Gafam (dont l’abus de position dominante n’est plus à prouver) ou BATX [Baidu, Tencent, Alibaba, Xiaomi] en Asie, start-up (dont l’espérance de vie est de quatre ans pour 60 % d’entre elles, selon les Echos). Tous aujourd’hui convoitent les marchés hier réservés aux professionnels de la publicité et de la communication. Et déclarent sans vergogne savoir tout faire, oubliant par là qu’être bon à tout revient à être in fine… bon à rien !

Des « solutions » de communication

Cet élargissement de leurs champs d’intérêt n’a, comme seules raisons d’être, que la quête de relais de croissance et la tentation - ô combien totalitaire - de maîtriser la globalité de la chaîne de valeur. La convergence entre business et marketing s’accélérant avec la digitalisation du monde, tous les appétits s’attisent. Voici donc venu le temps des packages de « solutions » de communication, structurées comme des offres de téléphonie. Et au prétexte qu’ils rachèteraient ou recruteraient massivement dans nos agences, ces acteurs émergents seraient subitement devenus compétents. C’est faire rapidement fi de notre capacité à avoir anticipé, pensé les mutations, intégré les technologies ; de notre savoir-faire éprouvé à accompagner et faire corps avec les problématiques de nos clients ; et enfin de notre aptitude à inventer continûment des méthodes innovantes, performantes, soucieuses de leur pérennité et de leur éthique. Nous ne les avons pas attendus.

Alors plutôt que de créer des écrans de fumée, de nous gargariser d’un méta-langage sans consistance, de méthodologies prétendument disruptives, il nous semble essentiel de revenir, de partager et de démontrer l’originalité de nos maïeutiques et la richesse de nos savoir-faire. Elles n’ont rien d’opportuniste, elles exigent une recherche permanente de valeur ajoutée et de vraies convictions telle la quête de la qualité, de l’expertise, de l’efficacité, du long terme, tout cela mâtiné d’une vraie culture de l’idée. Qu’il est sot d’affirmer que les marques « entrent en conversation » : elles le font depuis toujours. Et s’en tenir à des indicateurs de mesure quantitatifs n’apporte rien. La data n’est finalement qu’un outil supplémentaire à prendre en considération, ce qui est déjà le cas dans nos agences, de la même façon que le web a été intégré à nos offres dans les années 90.

Le temps de la transparence

Nous devons appeler à la transparence. Faisons amende honorable et reconnaissons que les agences - groupes en tête - ont entretenu, pour des raisons mercantiles, des relations troubles avec leurs clients. C’est cela qui a permis à d’autres acteurs de s’immiscer dans nos relations, dans nos complémentarités. En appeler au temps de la transparence qui n’a que trop tardé : nos clients l’exigent à raison. L’admettre, c’est commencer à renouer un lien de confiance souvent trahi. Partageons de façon concrète nos métiers, démontrons ce qui nous distingue et revenons à nos territoires de compétences, à ce qui fait notre originalité, notre utilité. En substance, dévoilons (enfin) l’alchimie lente et complexe du process de recommandation et de création. À ces conditions, nos agences ont peu de souci à se faire tant elles font mieux et plus que la totalité des « concurrents » nouvellement apparus. 

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