Audiovisuel
Aurore Bergé, députée LREM des Yvelines et auteure d'un rapport «pour une nouvelle régulation audiovisuelle à l'ère numérique» revient sur les différentes actualités de ces dernières semaines.

Les 40 propositions du rapport de votre mission d'information. S'il ne fallait en retenir qu'une ?

Aurore Bergé. D'abord la lutte contre le piratage. C'est une perte économique d'environ deux milliards d'euros. Aucun secteur économique n'accepterait de perdre autant en raison de pratiques illégales. On peut les combattre si on se donne les bons outils juridiques et techniques. Il s'agit de renforcer la Hadopi en lui conférant un pouvoir de transaction pénale, à travers une sanction pécuniaire qui permette d'aller au bout de la réponse graduée. Aujourd'hui, on a un processus dissuasif, pédagogique mais pas suffisant car il n'y a quasiment jamais de sanction qui intervient du fait d'engorgement dans la mesure où il faut attendre la décision du juge. La transaction pénale serait homologuée par le juge mais ce serait à la Hadopi de la signifier. Il y a aussi un point sur le téléchargement direct, le streaming. Les compétitions sportives font maintenant l'objet de piratage, ce qui a des conséquences pour les diffuseurs et les ayant droits, et derrière les fédérations. Il faut bien avoir conscience de la destruction de valeur existante. Ce n'est pas un combat ringard mais une lutte extrêmement importante pour la diversité culturelle et le financement des différentes chaînes culturelles et sportives. 



La réforme annoncée en 2019 de la loi sur la communication ?

A.B. C'est ce qui permettra d'être à armes égales entre les acteurs historiques et les nouveaux entrants. La loi de 1986 a été modifiée 80 fois, sans compter les nombreux décrets. Elle garde un certain nombre d'anachronismes avec des excès réglementaires notamment sur la publicité. Vous avez de la pub segmentée et géolocalisée sur Facebook et Google mais pas pour la télévision, ce qui est une perte de valeur pour les chaînes et pour le financement de la création. La taxe en faveur du CNC est ainsi moins abondée et c'est autant de recettes fiscales qui ne reviennent pas à l'Etat. Il y a à corriger ces asymétries règlementaires. Ceux qui financent la création sont les diffuseurs, les opérateurs télécoms et les exploitants de salles de cinéma. La taxe YouTube relève de l'anecdote. Il faut travailler sur une convergence fiscale.



La place de la publicité à la télévision et les secteurs qui n'y ont pas leur place : les promotions des distributeurs, le cinéma et l'édition ?

A.B. L'idée n'est pas de déstabiliser un secteur mais d'augmenter l'investissement publicitaire avec la publicité segmentée. La grande distribution bénéficie déjà d'un dispositif assoupli depuis 2007. Réallouer des revenus serait prendre un risque trop grand pour les radios dont 45% des recettes dépendent des distributeurs. Sur le cinéma, j'y suis à titre personnel très favorable. Le secteur nous le demandera à terme au nom d'une distorsion avec Netflix ou Amazon Prime qui peuvent faire leur publicité sans limite à la télévision. Pour ne pas déstabiliser les distributeurs de films, je demande une étude d'impact préalable. Enfin, pour l'édition, les acteurs eux-mêmes ne l'ont pas demandée.

 

La redevance audiovisuelle, ou contribution à l'audiovisuel public, que vous souhaitez voir élargie à l'ensemble des foyers ?

A.B. Oui. Il est légitime qu'un service public soit payé par tous même si vous n'en bénéficiez pas vous-même. Ce n'est pas parce que vous n'avez pas d'enfants que nous n'allez pas payer pour les écoles ou les crèches. Il y a une logique de solidarité et d'adaptation aux nouveaux usages. Les Français ne consomment plus la télévision comme il la consommaient en 1986. Selon les estimations, ce sont 100 millions d'euros qui doivent ainsi revenir à l'audiovisuel public pour lequel nous préconisons la suppression de la publicité sur Radio France et sur France 5. Nous avons par ailleurs écarté dans la mission le retour de la publicité sur France Télévisions entre 20 h et 21h. Ce n'est pas plus de publicité pour l'audiovisuel public mais plutôt moins, pour mieux le singulariser de l'audiovisuel privé. 



La voiture électrique, vedette du Mondial de l'automobile?

A.B. Les voitures decarbonnées représentent moins de 2% des véhicules vendues. Il faut un vrai soutien à la filière. C'est ce qu'on fait dans le projet de loi de finances avec le maintien du bonus malus. Il y a une prime écologique de 6000 euros pour permettre cette conversion des Français à des véhicules plus propres.



La passation de pouvoirs entre Gérard Collomb et Édouard Philippe?

A.B. J'ai regretté à titre personnel le départ de Gérard Collomb. C'est quelqu'un avec qui j'ai travaillé activement pendant seize mois. S'il n'avait pas fait le choix avec François Bayrou de soutenir Emmanuel Macron, je ne serais peut-être pas aujourd'hui députée. Il ne faut pas oublier d'où l'on vient et ce qu'on doit. C'est bien qu'il y ait une clarté. On ne peut pas être 100% candidat et 100% ministre.

 

La loi pacte et ses mesures pour stimuler l'actionnariat salarié?

 A.B. Elle a un vrai fil directeur, en bénéficiant d'une coproduction législative avec la société civile. Il s'agit de renforcer l'actionnariat salarié et en même temps de libérer les capacités d'initiative des entreprises en passant à de 4-6% à 10% des entreprises d'ici la fin du quinquennat. La baisse de moitié du forfait social dans les entreprises de plus de cinquante salariés, le fait que si un salarié souhaite investir, son employeur n'ait plus à payer que 10% d'impôts sur le montant qu'il verse ou qu'un chef d'entreprise puisse abonder unilatéralement le plan d'épargne de son entreprise sont des changements majeurs. Chefs d'entreprise et salariés peuvent avancer dans le même sens.







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