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Sous la marque AJ+, Dima Khatib, directrice générale du média en ligne, défend un produit éditorial indépendant du groupe Al Jazeera Media Network depuis cinq ans.

On devait la rencontrer à Paris pour la seconde fois. Confinement oblige, elle nous donne rendez-vous chez elle à Doha, au Qatar. Via Zoom, vue sur The Pearl, un archipel d’îles artificielles en construction. Robe colorée, cheveux détachés, Dima Khatib a toujours affiché son poste de directrice générale d’AJ+ avec « coolitude » et élégance. D’origine palestinienne et syrienne, elle a parcouru près de six continents et parle huit langues, dont le français. « J’ai laissé tomber l’idée d’appartenir à une terre ou à un endroit. »

Une histoire à raconter

Le confinement ne l’a pas ternie. Travailler à distance était déjà entré dans ses mœurs. Et c’est de cette façon qu’AJ+ a été construit. « Un modèle flexible basé non pas sur un correspondant permanent, mais sur l’histoire à raconter et la meilleure personne qui pourra la raconter ». Son autre défi ? La diversité. Pour viser le marché de la francophonie, AJ+ français a recruté des journalistes belges, suisses et originaires des pays africains. 

Depuis 2014, le média vidéo en ligne d'Al Jazeera Media Network, lui-même financé par le Qatar, couvre l’actualité en arabe, anglais, espagnol et français. Siégeant à Doha, AJ+ dispose de bureaux à San Francisco et au Mexique. « Je travaille plutôt la nuit, après avoir terminé mon rôle de maman. La journée, je vais au bureau. Ça m’a pris quelques années avant de trouver une sorte d’équilibre », confie-t-elle.

Aubaine

En 2012, pour celle qui était encore cheffe du bureau de l’Amérique latine d’Al Jazeera, il s'agissait de casser la continuité de la programmation en offrant un service d’information en ligne non traditionnel. Elle voit alors dans les réseaux sociaux une aubaine : « Depuis les Révolutions arabes, on a pensé à faire en sorte ce que ce soit plutôt les journalistes professionnels qui prennent cet espace. Il y a toujours un risque et on le voit avec les algorithmes, mais arriver à communiquer l'information, à échanger et construire avec les jeunes est une opportunité en or. »

Lutte contre les discriminations, diversité, inclusion... Le média essaye de trouver un équilibre. Y compris sur le Covid-19. « Les premières semaines, les gens avaient un appétit fou, puis l’intérêt a baissé. Ils s’orientent plus sur l’après et c’est très logique. »

D’après CrowdTangle, AJ+ français a enregistré le taux d'interaction le plus élevé sur Facebook en 2019 (1,121%). Mais le média a mis du temps avant d’être compris. « Ça a été un défi. Notre éthique est la même qu’Al Jazeera, mais on est un produit très différent. » On reproche pourtant au média un manque de transparence dans ses partis-pris : « On n’a rien à cacher sur ce qui nous sommes. On génère de l’inquiétude et c’est dû à notre réussite. », répond Dima Khatib, qui a postulé trois fois avant d’intégrer Al Jazeera. Aujourd’hui, au sein du groupe, elle est la seule femme directrice.

Parcours

1971. Naissance à Damas

1993. Traductrice et présentatrice pour la Radio suisse internationale.

1994. Master en arts (langues et traduction) à l’université de Genève

1998. Journaliste pour Al Jazeera (Qatar)

1998. Correspondante pour l’AFP (Qatar) 

2002. Correspondante pour Al Jazeera en Chine, puis en Amérique latine

2015. Directrice générale AJ+



 

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