Le conflit israelo-palestinien met les entreprises dans une situation complexe et nouvelle. Avec les campagnes de boycott qui s’accélèrent partout dans le monde arabe, les marques sont sous pression et la question de leur expression se pose.

Certains consultants recommandent aux dirigeants de prendre la parole pour «condamner la violence» mais «sans prendre position». Il nous semble que ces recommandations sont difficilement tenables.

Soyons réalistes, la condamnation de violences ou la dénonciation d’actes terroristes est une position universellement admise et partagée. Qui peut être pour des violences et des attaques de civils ? Qui peut être pour le mal ? Ainsi, pourquoi un dirigeant prendrait-il la parole pour enfoncer des portes ouvertes et annoncer «que l’eau mouille» ? Ce faisant, il s’expose au mieux à des sarcasmes, au pire, à une levée de bouclier pour une position déplacée ou un manque de courage et d’inaction.

La seule légitimité à prendre la parole est en interne, pour les entreprises directement impliquées avec des activités et des collaborateurs sur le terrain. En effet, la préoccupation de tous ira vers les collaborateurs et chacun voudra connaitre non pas le point de vue des dirigeants sur le conflit et ses violences, mais surtout les actions menées par l’entreprise pour protéger et accompagner ses équipes.

Pour ce qui est de la communication externe, en tant que citoyen et consommateur, nous attendons des dirigeants des grandes entreprises une parole forte et tranchée, pas un filet d’eau tiède qui viserait à satisfaire tout le monde, sans plaire à personne. Communiquer, c’est choisir. Communiquer, c’est toujours pour dire quelque chose. La communication doit être légitime et répondre aux attentes de clarification. Si la question de la condamnation ne se pose pas réellement, la prise de parole se révèle inutile voire contre-productive en faisant rentrer l’entreprise et le dirigeant sur un terrain politique. Seules les interpellations directes méritent d’être traitées et écoutées, avec des réponses sincères et personnalisées.

Une forme de retenue nécessaire

Si les consommateurs demandent aux marques et aux dirigeants de s’engager, cette demande touche au sociétal, et non au politique. Les prises de position politiques des marques ou de leurs dirigeants sont toujours vécues comme une forme d’ingérence et se retournent contre leur émetteur. En revanche, les consommateurs attendent des entreprises un engagement sur les sujets sociétaux et leurs prises de position sont alors vécues comme une vraie marque d’empathie. La distinction entre le politique et le sociétal est claire. Le sociétal engage et les entreprises peuvent agir légitimement car elles sont dans leur rôle, celui de faire bouger la société au sens large, d’apporter du positif et améliorer le monde.

Nous sommes convaincus que la situation actuelle, parce qu’elle est politique, exige des entreprises une forme de retenue. En effet, mis à part des marques ouvertement prises à parti, quel est aujourd’hui l’avantage de communiquer sur le conflit ? Prenez la défense d’Israël et c’est le monde arabe qui vous boycotte ; condamnez la riposte israélienne et vous prenez le risque de voir toute la communauté juive se détourner de vos produits ; trouvez une position équilibrée et ce sont les deux camps que vous brusquerez.

Communiquer, c’est parfois choisir de ne pas communiquer parce qu'on n’a rien à dire. C’est encore la meilleure manière de ne pas se retrouver «pris dans un débat qui nous dépasse».

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